Moi, c’est Kayss. J’ai eu 4 ans le 16 octobre 2024. Je déborde d’énergie et la danse fait partie de ma vie.
À l’aube de ma première rentrée en août 2023, je me suis réveillé avec la jambe énormément gonflée. Moi qui adore le foot, je ne portais plus le ballon aux pieds, mais sur le haut de la jambe. C’était gênant, mais je ne me plaignais pas de douleur. Je marchais, je courais aussi vite que les voitures Cars sur mon slip.
Cela n’a pas empêché maman de s’inquiéter et de m’emmener immédiatement à l’hôpital.
En l’espace de quelques heures, je découvre les blouses blanches et de nombreux examens bizarres : IRM, PET Scan, biopsie… qui révèlent une grosseur de 10 cm. Est-elle maligne (cancéreuse) ou bénigne (non dangereuse) ? À cet instant, la peur s’installe en nous. Une semaine après la biopsie, nous apprenons que ce cancer est 100 % malin.
Les médecins diagnostiquent un rhabdomyosarcome, un cancer qui prend naissance dans les muscles de ma cuisse. C’est un choc, mais pas le temps de réfléchir ! Nous débutons les traitements une semaine plus tard.
C’est maman, la première femme de ma vie, qui m’accompagne. Bien sûr, papa m’aime plus haut que les montagnes, mais l’amour de maman remplit la profondeur des océans. On aurait cru que tout se passait dans le haut de la cuisse, mais non ! Grâce à l’imagerie et au décours d’une biopsie dans le mollet, on découvre que c’est le point de départ : le monstre dans ma jambe est un rhabdomyosarcome métastatique ganglionnaire qui provient de mon mollet.
Tout cela pour un cancer méchant qui s’est propagé dans les ganglions les plus proches : d’abord le genou (ganglion poplité), puis ceux du haut de la cuisse (ganglions inguinaux), qui se sont enflammés et ont grossi jusqu’à former cette boule. C’est d’ailleurs cette dernière qui a donné l’alerte !
Après cet énorme coup de massue, nous nous sommes mis en marche. Ni une, ni deux, je suis allé au bloc pour me faire poser une chambre implantable. C’est un dispositif médical sous la peau qui permet de m’administrer tous les médicaments sans abîmer mes petites veines. Ce dispositif, c’est un peu comme si on avait caché une pièce de deux euros dans mes muscles, ou bien ma puce de super-héros !
Pendant 9 mois, on m’a piqué comme sur la photo. Au début, c’était très difficile, j’avais peur, j’hurlais malgré le gaz hilarant pour me détendre et la crème anesthésiante pour ne pas sentir la piqûre. Puis, pas à pas, grâce aux encouragements de Wonder maman, on a fini par y arriver avec le sourire.
Et voilà pourquoi j’ai raté ma première rentrée. J’ai débuté ma chimiothérapie le 12 septembre 2023.
9 cures sont planifiées pour détruire ces méchantes cellules. Chaque cure dure un mois si tout se passe bien, mais elle détruit aussi les bonnes cellules. Je n’aime pas trop la chimio : ça me fatigue beaucoup, ça me rend vulnérable à la moindre infection (ce qui m’isole de mes cousins et copains), ça me fait perdre mes cheveux, ça me donne la diarrhée, ça me fait vomir !
Tout un programme… Du coup, je ne grossis pas, d’où la sonde nasogastrique (c’est comme une paille qui va jusqu’à mon estomac pour que maman y dépose de la nourriture dans mon bidon). Maman est trop forte, en quelques jours elle gère tout. Une vraie magicienne !
C’est dur, l’adversaire est coriace, alors mettons toutes les chances de notre côté. Les médecins ont décidé de réaliser de la radiothérapie ! Non, ce n’est pas un traitement avec la radio, mais une machine avec des rayons super puissants qui a pour but d’éliminer les cellules cancéreuses.
Après 23 séances, j’ai obtenu mon diplôme de fin de traitement le 4 avril 2024.
Aïe, aïe, aïe, ces cellules sont rebelles, elles se déplacent : mollet, jambe, hanche… alors les médecins proposent une intervention. On ne va pas se mentir, cette intervention fait peur. Elle a été reportée plusieurs fois, et j’ai eu des hospitalisations imprévues parce que j’étais en aplasie et fébrile.
Le rythme est tellement dur et intense que maman est épuisée au point de s’évanouir. Qui peut tenir ce marathon en étant tour à tour cuisinière, aide-soignante, infirmière, maman, coordinatrice de soins, gestionnaire administrative, et femme de ménage sans en subir les conséquences ?
Après cette attente interminable, le bout du tunnel se précise. L’opération du 7 mai s’est bien déroulée, et il ne me reste plus que quelques séances de chimio. Ensuite, je pourrai prendre mon traitement sous forme de comprimés.
Je me suis réveillé avec une cicatrice allant de la cheville au genou. Avec ma chaussette et ma grosse botte de pluie, je me déplace comme un chef et je suis rentré à la maison quelques jours plus tard.
Alors que nous nous reposions avec maman, j’ai fait un grave malaise. Je ne tenais plus debout, je ne parlais plus. Vite, maman a appelé les secours. C’était une urgence. Pris en charge très rapidement, je convulsais. Après plusieurs examens, les médecins ont évoqué un AVC (accident vasculaire cérébral).
Mais qu’est-ce qui a pu provoquer cet AVC ? L’opération réalisée il y a 5 jours ? Les traitements ? La progression de la maladie ?
Toute la famille est sous le choc : papa se renferme, maman ne trouve plus le sommeil, marraine se sent impuissante. Mais moi, je vis, je survis et je me remets à la vitesse de l’éclair !
Le 18 juin, rendez-vous de contrôle à l’hôpital. La consultation express avec le chirurgien nous laisse un peu sur notre faim, nous qui avions de nombreuses questions.
En un claquement de doigts, je me retrouve dans la salle de plâtre. J’avais très peur, j’appréhendais beaucoup. Une fois le plâtre retiré, nous avons réalisé un moulage que je devrai porter pendant au moins 6 mois. Je m’étais habitué à ma super botte ! En attendant la confection de l’attelle, j’ai gardé la moitié de mon plâtre et des bandes pour maintenir mon pied.
Entre toutes ces épreuves, nous essayons de décompresser un peu : aller au zoo, gambader, même en boitant… sourire à la vie me suffit.
Puis le 26 juin, ce fameux mercredi, j’ai très mal à la tête et je vomis. Maman appelle l’hôpital et m’embarque en voiture. En un rien de temps, me voilà arrivé pour des examens complémentaires.
Je ne sais même pas comment vous annoncer tout cela, on va faire simple : les nouvelles sont mauvaises. Les médecins pensent que la maladie s’est déplacée dans ma tête. Depuis mon AVC, cette incertitude plane. Alors que nous envisagions de partir aux tropiques rejoindre marraine, les examens confirment qu’il y a un second round dans ma tête. Mes jours semblent comptés.
Comment y croire en me voyant souriant et plein d’énergie ? Non, non, on peut y croire, mais c’est bien la réalité : mes jours sont comptés. Pas question de baisser les bras.
Le 27 juin, on confirme que la maladie s’est bien installée dans ma tête et qu’elle a grossi. D’une petite goutte, elle mesure désormais 6 cm en moins d’un mois. Les médecins l’ont montrée à papa et maman sur l’écran. Ils disent qu’on ne peut pas la retirer et qu’on va recommencer une grosse chimio dans quelques jours. Ils me placent en soins palliatifs (soins qui n’ont plus pour but de guérir, mais d’accompagner), mais c’est parce qu’ils ne connaissent pas vos pouvoirs ! On va leur montrer !
Le 2 septembre, il y a un an je manquais ma rentrée. Ce matin, c’est d’un pas décidé que je vais à l’école. J’en parle depuis plusieurs semaines, j’avais tellement hâte : moyenne section, me voilà ! Et oui, le cancer n’est pas une contre-indication pour aller à l’école ! Bien au contraire !